Christoff DEBUSSCHERE
(né en 1962)
Nommé Peintre officiel de la Marine en 1997
Thématiquement,
la peinture de Christoff Debusschere s'oriente vers des sujets qui
n'ont rien de commun avec ce qu'a légué la tradition. Les hangars délaissés,
les garages huileux, les mécaniques oubliées qu'elle illustre témoignent d'une
fascination pour les rebuts du monde moderne que partagent certains mouvements
d'avant garde. Christoff Debusschere en pressent le pouvoir suggestif;
il révèle le rôle d'intercesseurs qu'ils jouent dans notre imaginaire.
Voyant, il s'acharne ainsi à élucider le mystère de l'existence. Il décèle
dans les lieux qu'ils ont fréquenté la présence d'êtres disparus. N'est-il pas
vrai que chacun laisse une trace qui, comme tout ce qui est humain, redevient
poussière ? L'intervention de l'homme, toute modeste qu'elle soit, modifie
l'apparence du désordre de l'univers.
Le
peintre la capte avant qu'elle ne disparaisse. Une chaise bancale qu'on
restaure prend une signification qui dépasse son statut de siège lorsqu'elle
trône sur l'établi de l'ébéniste. Le portrait qu'en fait un artiste lui ôte sa
banalité pour que d'objet, elle devienne le miroir d'un destin fatal. Elle
illustre alors les vanités et les illusions. Qu'est donc devenue la gloire de
cet avion qui s'élançait vers le ciel sous les regards admiratifs ? Par
ingratitude ou injustice, le voici désormais remisé pour toujours, demain
peut-être désossé. Un peu de nous-mêmes le compose.
Figé, le monde de Christoff Debusschere est plongé dans le silence.
Hanté de fantômes, il tire sa suggestivité de l'inconciliable réunion du
quotidien et de la tragédie.
Les
cimetières d'aujourd'hui ont trouvé leur interprète et la mélodie qui s'élève
n'a pas de notes : c'est pourquoi au cours des expositions certains chuchotent
de crainte de troubler ces instants émouvants, parenthèses étranges, sans
bruit.
Familier des sujets propres aux mouvements contemporains, Christoff
Debusschere n'en partage pas les conceptions. Le labyrinthe des images
codées ne l'inspire pas. Il est peintre, entend le rester et en mériter le
statut. Bien qu'isolé et quelle que soit la multitude des chefs d'oeuvre du
passé, il sait qu'on n'a pas encore tout dit avec des pinceaux et des
couleurs. il excelle à élaborer à l'huile de grandes toiles. Un réseau de
lignes, pensé, senti, conçu, structure ses oeuvres. La sobriété guide la
composition : chaque trait évoque l'essentiel et alimente la belle charpente.
Le squelette en place, la chair du tableau est le fruit d'un juste travail de
coloriste. La palette, déclinée en gris, offre une riche gamme de tons
soigneusement recherchés. Maître de chaque touche, le pinceau pose les
couleurs pour qu'elles entretiennent de suaves et secrètes relations. Le noir
n'est jamais un noir. Il résulte de la combinaison de teintes superposées qui
semblent osciller. Sans étalage, la virtuosité du peintre accouche d'une
sonorité vibrante, coeur battant du tableau. Hostile aux détails, Christoff
Debusschere poursuit des réflexions qui apparentent sa démarche à
l'abstraction. Conjointement, sa thématique rattache son oeuvre à la
figuration, Aurait-il réussi à combler la tranchée stérile qui séparait les
deux courants ? Il est possible, et souhaitable, que la peinture de
Christoff Debusschere évolue vers des horizons picturaux vierges. Son
oeuvre, déjà puissante, est encore jeune. Son souci d'épargner à son art une
orientation décorative est un atout complémentaire à son excellent métier. Le
respect de l'être humain qu'il traduit, ne serait-ce que par son désir de
communiquer ce que l'on pourrait appeler l'émotion, l'affranchit des
caractères morbides de l'art d'aujourd'hui. Ses autoportraits témoignent de
l'inquiétude vitale d'un homme investi par son talent, soucieux de poursuivre
son propre chemin. Qui sait ? Il pourrait ouvrir les portes d'un avenir où
l'art rimerait sans tricherie avec la vie. (Emmanuelle Tenailleau - La
Galonnière, le 29 août)
Disponibilité et prix des oeuvres sur demande
Availability and price upon request